lundi 9 août 2010

RADIOANATOMIE DES SINUS DE LA FACE

L.VIVARRAT-PERRIN, F. VEILLON

Hôpital de Hautepierre - STRASBOURG

1. Rappel anatomique :


Les sinus constituent des cavités creusées dans la partie supérieure du massif facial, la partie inférieure étant constituée par la mandibule.

Le maxillaire est un os volumineux, latéral et pair, creusé d'une profonde cavité : le sinus maxillaire. Il a la forme d'une pyramide triangulaire avec ses trois faces : antérieure (ou faciale), supérieure (ou orbitaire) et postérieure (ou infra-temporale). Il se détache de cet os quatre apophyses, frontale (ou supérieure), zygomatique (ou latérale), palatine (ou médiale) et alvéolaire (ou inférieure). La face antérieure du corps du maxillaire est limitée en haut par le rebord orbitaire. La face supérieure est plane et lisse, parcourue par la gouttière infra-orbitaire dans sa moitié postérieure, qui se transforme en avant en un canal infra-orbitaire. La face postérieure est convexe, percée par les orifices des canaux alvéolaires. La face médiale présente l'orifice du sinus maxillaire en avant duquel se disposent le sillon lacrymal et la crête turbinale inférieure.

Le sinus maxillaire réalise une vaste cavité creusant le centre du maxillaire. Ses parois ont une disposition identique à celle du corps de l'os. La présence du cornet inférieur divise la base ou face médiale en deux segments : supérieur répondant au méat moyen par lequel le sinus communique avec la cavité nasale, inférieur dans lequel s'ouvre le canal lacrymo-nasal.

L'ethmoïde est constitué par une lame verticale et médiane (lame perpendiculaire), une lame horizontale (la lame criblée) et deux masses latérales appendues au bords latéraux de la lame horizontale. La lame perpendiculaire présente une portion supérieure intracrânienne, l'apophyse crista galli et une portion inférieure entrant dans la constitution de la cloison nasale. La lame criblée est percée de très nombreux orifices, les trous olfactifs, la fente ethmoïdale et les trous ethmoïdaux antérieur et postérieur. Elle appartient sur sa face exocrânienne au plafond de la cavité nasale. Les masses latérales présentent six faces :

* la face latérale ou orbitaire (os planum ou lame papyracée),
* la face médiale ou nasale d'ou se détachent les cornets supérieur et moyen, lamelles osseuses convexes en dedans,
* la face supérieure s'articulant avec la surface ethmoïdale de l'os frontal,
* la face inférieure s'articulant d'avant en arrière avec la face médiale du maxillaire et l'apophyse orbitaire du palatin également,
* la face antérieure s'articulant avec l'os lacrymal et l'apophyse frontale du maxillaire,
* la face postérieure articulée avec la face antérieure du corps du sphénoïde. Ces quatres dernières faces sont creusées de cellules.

Le sphénoïde entre essentiellement dans la configuration de base du crâne (cf. chapitre radioanatomie du crâne). Il présente un corps cubique, des faces latérales desquelles se détachent en haut les petites ailes et en bas les grandes ailes : les apophyses ptérygoïdes se détachent de la face inférieure. Le corps est creusé d'un sinus auquel on décrit six faces. La face supérieure présente d'avant en arrière un jugum sphénoïdal, la gouttière optique, la selle turcique et la lame quadrilatère (dorsum sellae). La face antérieure divisée en deux par la crête sphénoïdale, présente de chaque côté un orifice de drainage du sinus. Elle s'articule latéralement avec la face supérieure de la masse latérale correspondante de l'ethmoïde. La face postérieure est articulée avec l'apophyse basilaire de l'occipital. Chaque sinus s'ouvre par l'ostium sphénoïdal dans la cavité nasale dans un récessus appelé récessus ethmoïdo-sphénoïdal.

L'os frontal présente des cavités creusées dans la partie écailleuse de l'os de part et d'autre du plan sagittal. Chacun d'eux communique avec la cavité nasale correspondante par les canaux nasofrontaux et s'ouvrent dans les méats moyens.

L'os palatin a la forme d'un angle dièdre droit. Il est constitué par une lame horizontale et une lame perpendiculaire réunies suivant une arête antéro-postérieure. La lame horizontale présente une face supérieure nasale appartenant au plancher de la cavité nasale et une face inférieure palatine appartenant à la voûte du palais. La lame perpendiculaire, mince et plane est située dans un plan sagittal participant dans sa face médiale à la constitution de la partie postérieure de la paroi latérale de la cavité nasale. Elle ferme l'espace qui sépare l'os maxillaire en avant de l'os sphénoïdal.

L'os lacrymal est une petite lame osseuse mince aplatie transversalement et présentant une face médiale appartenant à la paroi latérale de la cavité nasale et une face latérale qui entre dans la constitution de la paroi médiale de l'orbite. Cette face orbitaire est divisée en deux par une crête lacrymale postérieure en avant de laquelle se creuse la gouttière du sac lacrymal.

Lecornet inférieur, os pair et symétrique, a la forme d'une lamelle osseuse convexe vers le dedans. Du bord supérieur de cet os se détache deux apophyses verticales ascendantes (en avant l'apophyse lacrymale, en arrière l'apophyse ethmoïdale) et une apophyse descendante (l'apophyse maxillaire qui ferme en partie le hiatus maxillaire). L'apophyse ethmoïdale vient au contact de l'extrémité inférieure du processus unciforme de l'ethmoïde (petite lamelle osseuse orientée du haut vers le bas et de l'avant vers l'arrière). Il faut savoir que les cornets inférieurs et moyens ont une muqueuse qui est le siège de phénomènes physiologiques d'épaississement et d'amincissement avec alternance d'un côté à l'autre (jusqu'à 6 à 7 cycles par jour).

L'os nasal, pair et symétrique, limite en haut l'orifice antérieur commun aux cavités nasales. Il répond en dehors au récessus frontal de l'os maxillaire et en dedans à la lame verticale de l'ethmoïde ainsi qu'au cartilage du septum nasal.

Le vomer, os impair et médian, participe à la constitution de la cloison nasale. Son bord antérieur répond à la lame verticale de l'ethmoïde en haut et à une petite lame cartilagineuse indépendante. En bas, son bord postérieur libre regarde la lumière nasopharyngée. Son bord inférieur répond à la crête nasale formée par la zone de contact entre les processus internes de chaque os maxillaire en avant et palatin en arrière. Son bord supérieur est en contact avec la face inférieure du corps du sphénoïde.

2. Techniques d'imagerie:


2.1. Radiographie standard :

Les seuls clichés vraiment utiles dans l'exploration des cavités sinusiennes de la face sont les clichés de face haute, de Blondeau et l'orthopantomographie. Tous les autres clichés, notamment l'incidence de Hirtz et les tomographies sont généralement sans intérêt et ne doivent plus être réalisés.

L'incidence de Blondeau réalise une vue globale du massif facial dégageant particulièrement bien les sinus maxillaires (figure 1). Le nez et le menton sont situés contre la plaque. Le bord supérieur des rochers doit être situé au dessous des récessus alvéolaires des sinus maxillaires.




Figure 1 : Schéma d'une incidence de Blondeau. 1. Ramus mandibulaire, 2. Rocher, 3. Processus coronoïde, 4. Os zygomatique (malaire), 5. Processus orbitaire externe de l'os zygomatique (malaire), 6. Bord externe de la grande aile du sphénoïde, 7. Petite aile du sphénoïde, 8. Cellule ethmoïdale, 9. Sinus frontal, 10. Cornets moyen et inférieur, 11. Fissure orbitaire supérieure (fente sphénoïdale), 12. Grande aile du sphénoïde, 13. Canal sous-orbitaire, 14. Foramen ovale.


L'incidence de face haute réalise une vue de face du crâne et du massif facial . Le bord supérieur des rochers se trouve dans le tiers inférieur des orbites.


L'orthopantomographie (figure 2) est un cliché très important (cf. chapitre radioanatomie de la mandibule).

Dans l'ensemble, les clichés standards fournissent des informations limitées. Il ne sont indiqués que dans le bilan initial de traumatismes faciaux et comme clichés de débrouillage dans la pathologie inflammatoire.

Figure 2 : Schéma d'un cliché panoramique. 1. Condyle, 2. Processus coronoïde, 3. Dos de la langue, 4. Ramus mandibulaire, 5. Canal mandibulaire, 6. Os hyoïde, 7. Trou mentonnier, 8. Processus géni, 9. Ligne oblique externe, 10. Corps mandibulaire, 11. Ligne mylo-hyoïdienne, 12. Région angulaire, 13. Echancrure mandibulaire, 14. Cavité articulaire temporale, 15. Processus ptérygoïde, 16. Tubérosité maxillaire, 17. Sinus maxillaire, 18. Cavité nasale, 19. Canal incisif, 20. Palais osseux, 21. Orbite, 22. Zygoma.

2.2. Tomodensitométrie


C'est à l'heure actuelle, l'examen de choix dans l'exploration du massif facial en pathologie inflammatoire ou traumatique. Elle est complétée par l'imagerie par résonance magnétique dans le bilan des lésions tumorales ou pseudo-tumorales naso-sinusiennes.

L'exploration standard du massif facial comprend des coupes dans les plans frontal et horizontal (figures 3, 4, 5). Les sections horizontales sont réalisées dans le plan du palais osseux, des apex dentaires jusqu'au sommet des sinus frontaux, après repérage sur un mode radio de profil. Les coupes frontales sont perpendiculaires au palais osseux, mises en place sur un mode radio de profil, la tête étant plaçée en hyperextension. Ces sections frontales peuvent également être reconstruites par l'ordinateur à partir des données accumulées pendant les acquisitions horizontales. Les images bidimensionnelles ainsi obtenues évitent les artéfacts d'origine dentaire et permettent en plus des plans classiques d'obtenir des sections dans les plans sagittal ou oblique courbe dans l'axe du canal naso-frontal.

Figure 3 : Schéma d'une coupe tomodensitométrique horizontale du massif facial passant par la région des méats moyens. 1. Fosse nasale, 2. Espace aérique du cavum, 3. Aile latérale du processus ptérygoïde, 4. Fente ptérygo-palatine, 5. Méat moyen, 6. Ostium du sinus maxillaire, 7. Os zygomatique (malaire), 8. Cloison nasale, 9. Pyramide nasale, 10. Canal lacrymo-nasal, 11. Cornet moyen, 12. Sinus maxillaire, 13. Processus coronoïde de la mandibule, 14. Aile médiale du processus ptérygoïde, 15. Condyle mandibulaire.
 
 


Figure 4: Schéma d'une coupe tomodensitométrique horizontale du massif facial passant par les trous optiques. 1. Cellule postérieure reculée (ou d'Onodi), 2. Cellule postérieure centrale, 3. Cellule postérieure avancée, 4. Système bullaire, 5. Cellule unciformienne, 6. Cellule méatique antérieure, 7. Cellule méatique postérieure, 8. Cavité nasale, 9. Canal carotidien, 10. Trou optique, 11. Cristallin, 12. Globe oculaire, 13. Os planum (lame papyracée), 14. Muscle droit interne, 15. Muscle droit externe, 16. Nerf optique, 17. Sinus sphénoïdal
 
Figure 5 : Schéma d'une coupe tomodensitométrique frontale du massif facial passant par les ostia des sinus maxillaires. 1. Cavité nasale, 2. Méat inférieur, 3. Sinus maxillaire, 4. Processus unciforme, 5. Région du méat moyen, 6. Cellule de la bulle, 7. Racine d'attache verticale du cornet moyen, 8. Lame criblée, 9. Processus crista galli, 10. Cellule supra-bullaire, 11. Os planum, 12. Canal sous-orbitaire, 13. Ostium du sinus maxillaire et gouttière uncibullaire, 14. Cornet moyen, 15. Cornet inférieur, 16. Septum nasal.

L'intervalle de coupe varie entre 1 et 5 mm en fonction de l'indication et du nombre de plans à effectuer. L'espacement est généralement de 3 mm. Des coupes chevauchées avec un intervalle de 2,5 à 5 mm sont nécessaires si des reconstructions sur ordinateur sont souhaitées. L'approche osseuse nécessite des filtres durs permettant un abord spatial des structures anatomiques. Des fenêtres de 2500 à 3000 UH avec un niveau de 250 à 400 UH sont nécessaires pour l'exploration osseuse. L'injection intraveineuse de produit de contraste iodé est réservée à l'étude des lésions tumorales et des complications de la pathologie inflammatoire rhino-sinusienne.


Une acquisition hélicoïdale quand elle est possible peut être intéressante, permettant de s'affranchir des artéfacts de mouvement du patient (essentielle en pathologie traumatique ou tumorale); il ne faut en général pas dépasser 2 mm lors du déplacement du lit. Un pitch inférieur à 1 est souhaitable.

L'imagerie virtuelle est fondée sur le même principe que l'acquisition 3D statique. Un logiciel d'approche dynamique permet de "circuler" au niveau des fosses nasales et des différentes cavités sinusiennes le long des axes de drainage, permettant d'accéder aux petites structures anatomiques dont la reconnaissance est essentielle (paroi interne de l'orbite, nerf optique, artère carotide interne,...). Cette technique est particulièrement intéressante pour le chirurgien de par l'existence de multiples variantes anatomiques pouvant exposer à un risque de complication lors de la chirurgie fonctionnelle endonasale sous guidage endoscopique


2.3. Imagerie par résonance magnétique


Il est nécessaire d'avoir des coupes de 3 mm ou moins. Des matrices en 512x512 ou 512x256 donnent la meilleure résolution. Une antenne tête standard est suffisante avec des séquences réalisées au mieux dans les trois plans de l'espace. L'espacement des coupes est de 2 à 5 mm en fonction de la pathologie étudiée. Les séquences usuelles sont pondérées en T1 et T2 en spin écho. Deux à quatre excitations sont habituellement provoquées pour les séquences en T1 et deux pour celles effectuées en T2. L'injection de Gadolinium permet de bien délimiter les anomalies muqueuses, au mieux avec des séquences supprimant le signal du tissu adipeux. Les données fournies par le T1 et le T2 sans injection sont cependant peu modifiées par le Gadolinium qui peut surestimer un volume tumoral.

3. Résultats :


Certaines structures constituent des repères fondamentaux dans l'imagerie des cavités naso-sinusiennes. Leur situation peut être facilement reconnue avec de dedans et dehors le septum nasal, le cornet moyen, l'apophyse unciforme et la bulle ethmoïdale. Ces différents reliefs appartiennent à la paroi latérale des fosses nasales, essentielle à connaître car logeant les méats, zones de drainage des sinus.

Les plans horizontal et frontal, permettent une bonne étude de la systématisation ethmoïdale et des régions ostioméatales. La systématisation ethmoïdale est réalisée par les racines cloisonnantes des cornets moyen, supérieur, de l'apophyse unciforme et de la bulle. La racine cloisonnante principale est celle du cornet moyen, partageant l'ethmoïde en deux systèmes : antérieur et postérieur. La racine cloisonnante de la bulle subdivise l'ethmoïde antérieur en deux systèmes : bullaire (cellules intra et supra-bullaires) et pré-bullaire (cellules méatiques en dedans de l'unciforme, cellules unciformiennes en dehors). L'ethmoïde postérieur comprend trois types de cellules : la cellule postérieure avancée, la cellule postérieure centrale en-dehors de la précédente et enfin la cellule postérieure reculée (ou cellule d'Onodi) en arrière de la racine cloisonnante du cornet supérieur.

Les plans frontal et sagittal sont particulièrement adaptés à l'étude des rapports entre les récessus alvéolaires du sinus maxillaire et les apex dentaires.

Rappelons que la connaissance du drainage des sinus de la face est essentielle à connaître pour une bonne compréhension de la pathologie inflammatoire et rétentionnelle, donc pour une interprétation correcte des examens. Le complexe sinusien antérieur qui comprend les sinus frontaux, maxillaires et les cellules ethmoïdales antérieures se draine au niveau du méat moyen tandis que le complexe sinusien postérieur qui comprend les cellules ethmoïdales postérieures et le sinus sphénoïdal se draine au niveau du méat supérieur (cellules ethmoïdales) et dans le récessus ethmoïdo-sphénoïdal (sinus sphénoïdal). Le drainage du complexe sinusien antérieur se fait par l'intermédiaire de plusieurs orifices cellulaires qui débouchent dans trois gouttières formées entre les reliefs du récessus unciforme, du cornet moyen et de la bulle ethmoïdale. La gouttière unciturbinale est située entre l'apophyse unciforme et la racine d'attache du cornet moyen, en avant de la bulle. Elle draine les cellules du groupe méatique. La gouttière uncibullaire est située entre l'unciforme en avant et la bulle en arrière, draine les cellules du groupe unciformien. La gouttière bullo-turbinale ou rétro-bullaire est située entre la bulle et l'insertion postérieure du cornet moyen et draine les cellules du système bullaire. La conjonction de ces 3 gouttières forme une région appelée " étoile des gouttières " décrite par les chirurgiens ORL.

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