vendredi 12 décembre 2014

Observation clinique en prothèse complète


L'observation clinique est destinée, non seulement à l'examen des éléments anatomiques et physiologiques ayant une incidence sur le plan de traitement prothétique, mais également à créer, à maintenir, et à améliorer, une relation praticien-patient favorable à l'intégration organique et psychique du corps étranger constitué par la future prothèse. Elle doit être divisée en cinq grandes parties correspondant aux séquences essentielles de la réalisation de la restauration prothétique, esthétique fonctionnelle et phonétique d'une édentation totale.

* Eléments généraux et locaux à retenir sélectivement pour une orientation du plan de traitement pré-prothétique et prothétique et pour la création d'un premier contact favorable à l'établissement d'une relation agréable le praticien et son patient.

* Eléments anatomiques et physiologiques utilisés pour déterminer le choix des techniques d'empreintes préliminaires et secondaires.

* Eléments anatomiques et physiologiques et radiologiques ayant une incidence sur la détermination de la position et des mouvements mandibulaires.

* Eléments anatomiques et physiologiques et cinématiques destinés à décider du choix d'une morphologie et d'une technique de montage des dents postérieures et de leur équilibration post-prothétique.


Eléments généraux et locaux à retenir sélectivement pour une orientation du plan de traitement pré-prothétique et prothétique et pour la création d'un premier contact favorable à l'établissement d'une relation agréable le praticien et son patient.

L'examen comporte trois aspects, trois étapes :

- La présentation, le premier contact;
- L'interrogatoire, l'anamnèse;
- Les conclusions générales.

La présentation, le premier contact

Le premier contact est déterminant pour le succès final et pour la qualité de la relation praticien-patient.

Au cours de cette séance, avec beaucoup de bienveillance, de sympathie, de discrétion, l'opérateur doit s'effacer afin de laisser l'édenté exprimer aussi longuement qu'il le désire, ses aspirations, ses motivations, ses doléances éventuelles; alors que le patient expose ses déboires et sa démarche, le praticien note mentalement les éléments de diagnostic suivant : 

* Le sexe : 

L'aspect masculin ou féminin de la personnalité doit être recherché dans son expression physique structurale, comportementale, affective ou mentale.

* L'âge :

Il doit être la résultante de l'appréciation des trois vecteurs complémentaires ci-après :

- L'âge réel (état civil);
- L'âge des structures anatomiques et physiologiques;
- L'âge mental.

* Profession :

Les exigences de l'édenté varient avec son milieu, sa fonction sociale, ses aptitudes générales, son niveau intellectuel.

* Attitude, comportement (type constitutionnel, tempérament):

L'aspect objectif du type constitutionnel du patient devra être cerné en s'aidant  des typologies classiques : Sigaud, , Vannier, Kretschmer et Corman.

L'aspect subjectif du profil psychologique et psycho-psychanalytique sera recherché puis affiné en s'appuyant sur les typologies de House, de Lesenne, de Jung et sur la cosmopsychologie la plus classique.

Interrogatoire, Anamnèse 

Il ne doit pas prendre la forme d'un questionnaire froid et maladroit. Le patient doit nous révéler à son insu, les facteurs généraux et locaux ayant une incidence sur le plan de traitement.

* Facteurs généraux :

- Facteurs Héréditaires :

Le terrain, le type constitutionnel dépendent souvent des facteurs héréditaires; ceux-ci seront évalués avec prudence.

- Etats pathologiques congénitaux

- Etats pathologiques acquis tel que :

<  Le diabète, avec polyurie, polyphagie, polydypsie, et sécheresse buccale.
<  La maladie de paget ou ostéite déformante évolutive.
<  La maladie de Hand-Schüller-Christian, avec altération de la structure de l'os.
<  Le syndrome de Plummer-Vinson caractérisé par une atrophie de la muqueuse buccale et des altérations commissurales?
<  La maladie de Parkinson, dont les signes cliniques interdisent un traitement aisé et un pronostic favorable.
<  L'irradiation aux rayon X et l'ostéoradionécrose.
<  La tuberculose
<  Les troubles endocriniens pouvant concerner :

     - L'hypophyse, agissant sur les tissus épithéliaux et conjonctifs;
     - La thyroïde et la parathyroïde dont l'action sur le métabolisme du calcium est importante dans le comportement de l'infrastructure osseuse des surfaces d'appui prothétiques.

<  Les avitaminoses: A, B, C ou D.
<  La sénescence et la sénilité.
<  Les altérations d'origine psychosomatique:

     - Altérations générales telles que hypertension ou hypotension, troubles du système respiratoire, perturbations gastro-intestinales, perturbations de l'équilibre nerveux;
     - Altérations loco-régionales ou locales telles que les douleurs des articulations mandibulo-temporales, hypersalivation ou asialie, bruxisme, ulcération des muqueuses.
     - Troubles de la ménopause ou de l'andropause.
     - Etats psychiques normaux ou pathologiques : attitudes mentales, névroses, psychoses.

* Facteurs locaux:

<  Antécédents familiaux, attitudes des parents et grands-parents ou proches à l'égard des prothèses complètes.
<  Histoire de la denture du patient :

     - Dentures naturelles, avulsions, restaurations prothétiques fixées, amovibles partielles;
     - Prothèses complètes précédentes.

<  Motivations :

      - Conscientes : esthétiques fonctionnelles et phonétiques;
      - Inconscientes.

Conclusions générales 

Au terme de ce premier contact, le profil morphopsycgo-psychanalitique de l'édenté doit être clairement ébauché.

Il sera affiné et complété au cours de toutes les autres séances de la construction de la restauration prothétique.

Il doit nous permettre d'emblée de savoir si la personnalité du patient, son attitude mentale, et ses motivations sont telles que l'intégration psychique de la prothèse sera aisée, impossible, tumultueuse ou difficile à préciser.

La mise en condition psychique, à un degré plus ou moins important, s'imposera toujours, afin d'améliorer la relation praticien-patient. L'état général nous incitera très souvent à rechercher la collaboration d'un médecin généraliste ou spécialiste.

Eléments anatomiques et physiologiques utilisés pour déterminer le choix d'une technique d'empreinte

Le choix d'une technique d'empreinte dépend de l'examen d'éléments généraux et locaux.

Eléments généraux 

- Degré d'ouverture de la bouche (perlèche).
- Salive : abondance et viscosité.
- Réflexe nauséeux éventuel.
- Coloration générale et aspects de la muqueuse buccale.
- Allergies.
- Etats pathologiques tels que leucoplasie, lichen, hyperkératose.
- Existence de dents à extraire.
- Examen radiographique systématique.

Eléments locaux 

* Examen clinique du maxillaire supérieur:

a) Tissu osseux : 

l'analyse s'effectuera toujours dans les trois plans de l'espace, horizontal, sagittal, frontal. Elle abordera successivement :

- Le procès alvéolaire ou crêtes: leur volume, leur hauteur, leur degré de résorption ainsi que la qualité de la corticale seront appréciés;
- La voûte palatine :  sa largeur, sa profondeur, l'étendue des surfaces planes favorable à la sustentation seront étudiées;
- Les tubérosités: leur proportion, leur relief, leur distance relative au plan d'occlusion seront soulignés;
- Les procès zygomatiques;
- Les sillons ptérygomaxillaires;
- L'épine nasale antérieure;
- La suture intermaxillaire avec l'existence éventuelle de torus palatin.

b) Les tissus de revêtements: 

- Surface d'appui primaire et voûte palatine : 

De la superficie à la profondeur, il convient d'étudier :

< La fibromuqueuse  dont l'épaisseur, le degré d'adhérence, l'élasticité conditionnent la tolérance prothétique;
< Les tissus sous-muqueux, glandulaires ou graisseux.

- Versants vestibulaires et lignes de réflexion :

Le versant vestibulaire des crêtes est recouvert d'une muqueuse plus ou moins apte à supporter les pressions et les frictions; son épaisseur, son adhérence doivent être appréciées. Les tissus sous-muqueux ont une importance capitale au niveau des lignes de réflexion de la muqueuse.

c) Les organes périphériques : 

En raison de leur participation à l'instabilité ou à la stabilisation de la future prothèse, seront analysés successivement :

- Le frein médian de la lèvre supérieure et les orbiculaires;
- Les freins latéraux ou insertion des muscles de la mimique;
- Le buccinateur et ses insertions;
- L'espace paratubérositaire;
- Les ligaments ptérygomaxillaires;
- Le voile du palais, son orientation, sa limite ou zone de flexion;
- Les fossettes palatines.

* Examen clinique de la mandibule

a) Le tissu osseux :

L'analyse sera conduite de la même façon pour le maxillaire supérieur. Il convient d'examiner systématiquement :

- La corticale osseuse, son épaisseur (radiographie), don relier;
- La crête ou rebord alvéolaire: son degré de résorption sera évalué  selon les critères décrites par Atwood.

L'aspect négatif ou positif quant à la rétention doit être souligné.Parmi les éléments anatomiques à apprécier, il convient de citer : les lignes obliques externes, le trou mentonnier, les apophyses géni, les tori mandibulaires, les lignes obliques internes.

De leur appréciation, dépend la décision préprothétique ou prothétique, de zones de décharge, de mise en condition, ou de chirurgie.

b) Les tissus de revêtement :

Plus qu'au maxillaire supérieur, leur aspect anatomique, physiologique a une importance considérable. Il conviendra donc d'apprécier tant au niveau de la fibro-muqueuse qu'au niveau de la muqueuse, le degré d'élasticité, l'adhérence et l'épaisseur du tissu de revêtement de la surface d'appui.

c) Les organes paraprothétiques :

Ils jouent un rôle majeur dans la stabilisation de la future prothèse. Il conviendra d'examiner successivement:

- La région vestibulaire antérieure avec les orbiculaires, les muscles du menton, et tous les muscles de la mimique concentrant leur activité au niveau du modiolus.

- La région vestibulaire latérale et postérieure; occupées dans sa presque totalité par les fibres horizontales du buccinateur et limitée par les fibres antérieures du masséter.

- La région sublinguale assurant la rétention de la future prothèse dont les éléments négatifs à apprécier sont les insertions du génioglosse et le relief des apophyses géni.

- La région sous-mylohyoïdienne mobilisée par le muscle mylohyoïdien et par le jeu de la langue.

- La niche rétromolaire occupée par l'arc palatoglosse.

- La langue : son volume, sa position jouent un rôle non négligeable dans la stabilisation ou dans la mobilité des prothèses complètes.

Conclusions 

Le conclusions sont préprothétiques et prothétiques :

* Conclusions préprothétiques : 

Elles sont de deux ordres :

-  D'ordre général : Traitement des lésions psychosomatiques, amélioration de l'état général.
-  D'ordre local :  L'option doit être prise à ce stade soit d'une mise en condition des tissus de support de la future prothèse, soit d'une chirurgie préprothétique toujours économe.

* Conclusions prothétiques :

L'examen clinique de chaque maxillaire permet le choix d'une technique d'empreinte préliminaire et d'une technique d'empreinte secondaire bien définie. Rappelons que ces deux empreintes sont indissociables et complémentaires.

 Eléments ayant une incidence sur la détermination de la position de la  mandibule.

L'examen et l'évaluation de ces différents éléments comportent cinq séquences d'analyse permettant d'aboutir à des conclusions préprothétiques et prothétiques :

- L'anamnèse,
- L'examen exobuccal,
- L'analyse radiologique,
- La localisation et le transfert de l'axe charnière,
- La détermination et le transfert de la relation maxillo-mandibulaire centrée d'analyse.

Anamnèse

L'état général physique et psychique doit le premier retenir notre attention.

Un questionnaire dactylographié détaillé peut être confié à l'édenté, afin que celui-ci note tranquillement tout son passé médical, tous les symptômes généraux actuels, la date de sa dernière visite chez son médecin ou spécialiste, ses doléances prothétiques, ses motivations...

Au stade terminal de l'édentation totale, un passif de troubles neuromusculaires et neuro-articulaires  doit toujours être suspecté.

Tous les signes plus ou moins subjectifs d'une altération du complexe stomatognathique, tel que, algies loco-régionales, migraines, douleurs oculaires, craquement, subluxation au cours de chaque bâillement, doivent être découverts et analysés.

Très souvent, un contact direct, pendant la narration des antécédents pathologiques généraux et loco-régionaux, est de loin préférable afin qu'une relation patient-praticien bénéfique se noue d'une façon insensible. Cette relation permettra de percevoir intuitivement tout ce que le consultant n'aurait pas voulu ou su exprimer par écrit.

L'état psychique pourra ainsi être apprécié d'une façon plus précise. Toute anxiété anormale, toute dépression apparente, toute tension excessive, pendant l'exposé devra incité à rechercher si un traitement médicamenteux spécifique ou psychanalytique est en cours ou a déjà été pratiqué.

Examen exobuccal

Il intervient d'une façon systématique dès que l'édenté a terminé l'exposé de ses antécédents généraux et locaux.

Il a pour objet d'étudier successivement : 

- La mobilité mandibulaire
- Le comportement de L'articulation mandibulo-temporale.
- Le complexe musculaire cranio-vertébro-scapulo-hyo-linguomandibulaire.

 * Mobilité mandibulaire : 

L'ouverture buccale est mesurée avec une régle graduée. Le trajet symphysaire d'abaissement et d'élévation de la mandibule est éprouvé en vuede détecter toute latéro-déviation. Les mouvements de propulsion, de latéralité droite et gauche, sont ensuite analysés en direction, qualité et intensité.

* Comportement de l'articulation mandibulo-temporale.

L'auscultation simultanée, digitale et au stéthoscope s'impose. Elle est destinée à mettre en évidence les zones douloureuses prétragiennes, auriculaires uni ou bilatérales, les craquements ( dysfonction), les crépitements (altération des surfaces articulaires), les subluxations.

* Examen du complexe cranio-vertébro-scapulo-hyo-linguomandibulaire.

Il consistera essentiellement sur à une palpation méthodique à droite puis à gauche de l'origine de l'extrémité, et du corps de tous les faisceaux musculaires de ce complexe .

Il sera conduit systématiquement dans l'ordre suivant : 

Muscles masséters au niveau de leurs deux chefs :
- chef profond en avant de la capsule;
-chef superficiel par pincement de la joue.

Muscles temporaux au niveau de leurs deux chefs:
-chef antérieur, par pression digital un centimètre en arrière de l'oeil;
-chef postérieur, par pression, un centimètre au dessous de l'oreil.

 


 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts with Thumbnails